mercredi 29 janvier 2014

Portrait : X-Maleya, nouvelle dimension

Le groupe donne un concert le 14 septembre 2014 dans la mythique salle de spectacles parisienne. Un enjeu de taille pour le trio qui aiguise ses dents pour croquer le monde, en prenant l’Afrique pour marchepied. Retour sur le parcours de ces nouveaux ambassadeurs de la musique camerounaise, auteurs de quatre albums. 

De g à d. Haiss, Auguste et Roger

L’Olympia, tous les artistes en rêvent. En Afrique, les plus grands ont donné des concerts dans ce music-hall créé en 1889 à Paris : Tabu Ley Rochereau, Koffi Olomidé, Fally Ipupa, Ismaël Lo, Manu Dibango et maintenant… X-Maleya.

Un rêve caressé depuis longtemps et qui, pour le trio de trentenaires (Roger Samnig, Auguste Rim et Haïss Zaiter) représente une étape importante de leur carrière musicale, comme en témoigne Roger, le porte-parole du groupe : « On vit ici mais on va faire l’Olympia, c’est notre challenge. Pour nous, c’est le moment de passer à autre chose. C’est nous qui produisons ce spectacle mais à ce niveau, il ne s’agit plus de X-Maleya mais du Cameroun ». Pour le coup, X-Maleya va se faire accompagner par une grande équipe : « on ira avec tous les musiciens, les danseurs et les réalisateurs qui nous ont accompagné jusqu’ici. On prendra aussi un jeune groupe camerounais qui n’a pas encore de nom pour la première partie de notre spectacle ».

C’est donc un rêve devenu réalité pour ce groupe de musique qui lance aussi une marque de vêtement qui sera vendu dans deux boutiques à ouvrir à Yaoundé et à Douala. Son quatrième album, « Révolution », est sorti en août 2013. Par cet opus produit par Empire Company du rappeur Pitt Baccardy, le groupe s’est donné une nouvelle ambition. Une affiche gigantesque sur un pan de mur de l’immeuble Shell, en plein cœur de Yaoundé, annonçait la couleur. Mais la révolution est restée plus dans l’approche marketing que dans la musique, selon une bonne partie de la critique. Des critiques qui ont touché les X-Maleya en plein cœur.
        
Les X-Maleya. De g à d: Roger, Haiss et Auguste
Critique amère
Invité d’une rencontre professionnelle avec des journalistes culturels de la Cameroon art critics (Camac) le 23 janvier dernier à Yaoundé, le groupe n’a pas manqué de dire sa déception par une longue tirade de Roger: « Sur notre quatrième album, j’ai vu la haine, la méchanceté des gens. Je ne peux pas faire comme si ça n’a jamais existé. Nous ne demandons rien à personne, nous ne trichons pas, nous travaillons pour donner quelque chose à ce Cameroun. Aujourd’hui, si vous écrivez des choses comme « ils se répètent », « c’est du déjà entendu », vous détruisez le groupe. Mais vous n’êtes pas Dieu. A la limite, n’écrivez pas mais ne détruisez pas ce que nous faisons. Si vous devez devenir de grands journalistes, c’est parce qu’il y aura de grands artistes. Si on fait la musique, c’est par passion. Il faut écrire avec du recul, en laissant ses émotions de côté ».

Les clips sont en train d’être tournés progressivement. Dans ce nouveau-né, X-Maleya a introduit des chansons de son premier album, « Exil ». Des chansons passées inaperçus depuis 2006, et que le groupe essaie de faire connaître. Depuis la sortie de ce dernier album, le groupe n’a pas encore donné de concert. Haiss explique que « dans notre contexte, il n’est pas très intelligent de faire des concerts juste après la sortie d’un album car le public ne connaît pas encore les chansons. Il faut lui laisser le temps de les apprendre, pour pouvoir chanter en cœur avec nous en concert ». Pour eux, aucun album des X-Maleya n’a décollé dès qu’il est sorti.

Ambition, les X-Maleya veulent passer à une autre dimension, sortir de l’espace camerounais, traverser le champ africain pour s’ouvrir au monde en prenant pour crédo talent, professionnalisme et rigueur. Mais cela ne va pas sans heurts, d’après Roger : « A un moment donné du travail, il faut éviter d’avoir des états d’âme et laisser l’amitié de côté pour évoluer. La musique est un métier, il faut travailler avec des professionnels ». Une ambition qui reste à être atteinte pour ce qui est de la communication du groupe. Par exemple, son site internet officiel, www.xmaleya.com, garde à ce jour l’album « Tous ensemble » (2011) en actualité.

Le destin du groupe a changé avec sa rencontre avec Pitt Baccardy, producteur de « Tous ensemble ». Le label Empire Company leur a ouvert bien des perspectives et permis de toucher d’autres artistes africains. Le groupe multiplie les featurings : Pitt Baccardy, Chidinma, J. Martins, Passi, Pharell Williams, etc. Et les apparitions du footballeur Samuel Eto’o dans ses clips. X-Maleya est invité à participer à l’hymne officiel de la Coupe d’Afrique des Nations de football en 2012, aux côtés de Patience Dabany et Magic System, entre autres. Depuis 2011, X-Maleya innove en adoptant une approche originale pour sa distribution. Les Cd sont vendus à 1000Fcfa à tous les coins de rues par des vendeurs d’œuvres piratées. Et s’écoulent comme des petits pains. Mais malgré le succès, X-Maleya n’oublie pas d’où il vient, de loin.

Parce qu’on vient de loin
Le groupe est formé au début des années 2000. Tout est parti de l’amitié entre Roger et Auguste. Dans les années 1996, les deux garçons dansent avec Kris Badd sur des chansons de Michael Jackson, leur idole. Trois ans après, ils décident d’associer le chant à la danse. Vient ensuite la rencontre avec Haiss, avec qui ils travaillent comme guitariste. « On s’est fixé des objectifs et prit un autre chemin », explique Roger. Le groupe fait alors du hip hop et du rap. Puis, ils décident de se donner nom : un nom camerounais qui sonne bien et qui se retient facilement. Maleya, qui signifie conseil en langue bassa, est choisi et le X- ajouté pour faire style.

Le groupe, qui a composé plusieurs chansons, se met en quête d’un arrangeur. Ruben Binam, ancien du groupe Macase, décide de les produire. Mais ils devront attendre trois ans avoir de voir naître leur premier bébé, « Exil », sous le label Alizés Equateur Record en 2006. Le style a changé. Ce n’est plus du rap mais une savante fusion de genres : « C’est Ruben [aujourd’hui chef d’orchestre du groupe, Ndlr] qui a donné de la couleur a notre musique », reconnaît Haiss. Le groupe sait que c’est la bonne voie et s’accroche. En 2007, il reçoit un financement du Compte spécial d’affectation pour le soutien de la politique culturelle qui lui permet de sortir, en 2008, son second album « X-Maleya» en autoproduction. L’album cartonne avec son titre « Yelele » et lance le groupe, le faisant sortir de l’ombre pour la lumière. Un succès confirmé par « Tous ensemble » qui propulse le groupe à un niveau supérieur.  

Dieu, au centre de tout
X-Maleya sait à qui il doit ce succès et le clame haut et fort : à Dieu, incontournable dans leurs albums. « Il y a 1000 bons chanteurs là dehors. C’est par la grâce de Dieu que nous faisons ça », dit Roger. Après Dieu, vient l’organisation interne et la discipline : « le groupe est organisé, de right man at the right place. Chacun respecte sa place, personne ne jalouse l’autre. Quand il y a des problèmes, on se parle, on se soutient. Et on laisse tout à Dieu, c’est ça qui fait avancer les choses», témoigne Haiss. X-Maleya sait que « Ce n’est pas le talent qui fait arriver, c’est l’état d’esprit. Nous sommes honnêtes à morts. Le jour où nous serons malhonnêtes, nous allons tomber », ajoute Roger. Le groupe clame aussi son humilité. « Ma vie n’a pas changé, on est resté humble. En public, je peux être sur la défensive ou nerveux, mais ce n’est pas parce que j’ai la grosse tête », dit encore Roger.

X-Maleya promet : dès 2015, il y aura un nouvel album. Et il compte bien gravir ainsi une marche plus haute de l’escalier du succès.

Stéphanie Dongmo 

Médias : le programme francophone de la Deutsche Welle menacé

La Rédaction francophone de la DW
Le 20 janvier 2014, la direction de la Deutsche Welle (DW) a présenté sa nouvelle stratégie médiatique. Celle-ci implique des changements importants pour les rédactions régionales, et notamment pour la rédaction francophone de la DW.

Peter Limbourg, le nouveau directeur général de la DW, a décidé de miser sur l’anglais (essentiellement TV) pour « être à hauteur de la concurrence internationale », comme l'indique son communiqué de presse. La DW prévoit notamment la fermeture de la rédaction portugaise pour l’Afrique et une réduction drastique du programme en français.

Les journalistes de la rédaction francophone ont lancé une pétition contre cette décision : « Mais peut-on concevoir l’Afrique sans la Francophonie et sans la radio? Faut-il abandonner l’idéal de vouloir proposer au public une alternative, même modeste, à l’offre de RFI et de la BBC ? Quel avenir pour le programme radio et le site internet en français, qui contribuent à la promotion des artistes africains de tous horizons, mais qui proposent aussi des émissions éducatives, d'autres consacrées à l'environnement, à la santé, à la politique, à l'économie, aux droits humains ?» se demandent-ils.

Créé en 1953, la DW est le service international de diffusion de l’Allemagne.
 Pour contacter sa rédaction francophone, par mail (francais@dw.de) ou par sms (0049-176-64121263)

 S.D. 

GPAL 2013 : Comment une belle idée sombra dans l’arnaque et l’imposture

Le regard critique d’un enseignant-chercheur sur le Grand Prix des Associations littéraires décerné le 7 janvier 2014 à Yaoundé par le Club des Muses.

Francis Bebey, Grand Prix de la Mémoire aux GPAL 2013

Le 7 janvier dernier s’est tenue à l’Institut Français de Yaoundé, une cérémonie de remise des prix, annoncée à grand renfort de publicité par les journaux quotidiens et les médias audiovisuels. Plusieurs associations littéraires ayant cru à cette initiative, ont présenté à ce concours littéraire, plus de cinq cents livres d’auteurs plus ou moins connus de la scène intellectuelle camerounaise, publiés dans les derniers dix-huit mois, comme le stipulait le règlement dudit concours.

Au final, le « Grand Prix de la Mémoire » fut décerné à Francis Bebey ; dans les deux autres catégories retenues (recherche et belles lettres), l’organisateur fut le principal gagnant ! En violation du règlement qu’il a lui-même écrit pour son concours, Eric Mendi le président de l’association organisatrice de l’événement (Le Club des Muses) s’attribua éhontément le « Grand Prix des Belles lettres » pour son roman intitulé « Opération Obama », publié par une maison d’édition qui n’existe que dans son imagination, car portant le nom de son association (Le Club des Muses, association des belles lettres) !

Dans la deuxième catégorie « Grand Prix de la Recherche », le lauréat désigné fut Magloire Ondoa ; seul problème et grosse curiosité, le titre primé n’était pas en compétition ! Le battage médiatique s’est fait autour des 67 volumes et 250 tomes de « Textes et Documents du Cameroun (1815-2012) » alors que le jury a reçu pour examen « Introduction historique au droit camerounais : la formation initiale, éléments pour une théorie de l’autonomie des droits africains » ! Simple méprise ou complicité d’escroquerie savamment organisée ? La réponse est attendue !

L’ordonnancement de la cérémonie de remise des lots fut en lui-même un cas de haute voltige dans la fumisterie : le président du jury relégué au bout de la table, privé de proclamer les résultats, réduit à serrer les mains des personnes appelées sur l’estrade par un présentateur (Armand Okol) distributeur des lauriers, aux propos déplacés et discourtois surtout à l’égard des dames invitées au podium, jetant un malaise et un climat de gêne dans l’assistance ; pas de mot de bienvenue ou sur la portée de l’événement par l’organisateur ! Pourquoi ? Parce que trop flagrant ! Comment peut-il se présenter comme organisateur et s’adresser à l’assistance alors qu’il s’est attribué le titre de lauréat ?

Eric Mendi s’est contenté de se faire tout petit dans la foule, attendant avidement récupérer son prix et disparaître ! Dans une cérémonie dédiée aux livres, les éditeurs furent royalement oubliés ! bien-sûr, car l’éditeur du lauréat-organisateur est aussi son association, qui l’a présenté à son propre concours ! Bien plus curieux, pas de représentant du principal sponsor de l’événement, Castel Beer, qui aurait pu expliquer cette association entre une marque brassicole et la littérature !

Les questions que je me pose c’est comment les membres du jury ont travaillé et procédé à leurs délibérations ; quels sont les choix qu’ils ont porté et comment entendaient-ils sécuriser les secrets de leurs délibérations ; par quelle alchimie ont-ils été convaincus de cautionner pareille imposture et laissé faire en y associant leur nom à cette arnaque ? Qui étaient-ils ? Des personnalités toutes respectables : Président du Jury, Guillaume Oyono Mbia ; membres : le sénateur Pierre Flambeau Ngayap, le conseiller municipal Célestin Djamen, les journalistes Alain Belibi, Sarah Sakho, Suzanne Kala Lobe…

En fait de secret, il n’y en avait pas du tout : dans les six valises publicitaires faisant office de lots destinés aux nominés, les livres étaient déjà estampillés du sceau de « Lauréat » ou de celui de « nominé » ! Tout laisse montrer qu’il n’y a jamais eu de secret, les prix furent attribués d’office par l’organisateur sans même la pudeur d’un simulacre de proclamation par le jury ! Dans les valises remises aux nominés, qui ne furent ouvertes qu’après la cérémonie, rien de la valeur de ce qui avait été annoncé à l’assistance : deux pagnes publicitaires Castel beer, deux tee-shirts noirs Castel beer, une enveloppe contenant le règlement du concours, une plus petite contenant une sorte de diplôme plastifié remerciant le nominé pour sa participation aux GPAL 2013 et enfin cinq livres présentés par les auteurs en compétition dans les deux catégories Recherche et Belles-lettres.

Comme le présentent les billets d’invitation à la cérémonie les nominés furent :
-          Dans la catégorie « Grand Prix de la Recherche » : « L’idée de progrès dans la diversité des cultures » d’Ebenezer Njoh Mouellé et Thierry Michalon ; « Textes et Documents du Cameroun (1815-2012) », de Magloire Ondoa ; « Cameroun, l’opposition en panne », d’Ahmadou Séhou.
-          Dans la catégorie « Belles-Lettres » : « Un tilleul au Cameroun », de Marie Hurtel ; « Sur les traces d’une vie en demi-teinte » de Hilaire Sikoumo ; « Opération Obama », d’Eric Mendi.
Les vainqueurs furent Magloire Ondoa avec « Introduction historique au droit camerounais : la formation initiale, éléments pour une théorie de l’autonomie des droits africains », remis au jury sans être officiellement en compétition et Eric Mendi avec « Opération Obama », puisqu’il est l’organisateur de l’événement et son propre éditeur.

Floué par tant de prestidigitation, j’ai appelé Eric Mendi, le président du Club des Muses, association organisatrice de l’événement pour obtenir des clarifications ; par exemple comment un titre hors compétition peut-il se retrouver entre les mains du jury ou comment on peut être à la fois écrivain, éditeur, organisateur et lauréat de sa propre compétition. Il m’a raccroché au nez, me demandant de le saisir par mail si j’avais des questions à lui poser. J’ai récidivé en lui envoyant un texto lui disant que « Je ne peux en aucun cas cautionner une imposture. Je vais saisir la presse et toutes  les personnes concernées ou impliquées dans cette grossière escroquerie. » Jusqu’ici sans réponse. Je voudrais simplement lui redire avec force, reprenant la quatrième de couverture de son  « opéra » qu’ : « Eric, tu mens ! Ton film-là n’est pas vrai. Tu inventes ! ».  

Ce qui me révulse c’est que tant de personnalités respectables soient associées à une escroquerie de cette nature et que son auteur puisse s’en vanter ou se pavaner en prétendant se couvrir de gloriole.

Ahmadou Séhou
Enseignant-Chercheur

Auteur de : Cameroun, l’opposition en panne : autopsie critique et propositions de relance, Yaoundé, Editions Lupeppo, 2012, 472 p. (Préface de Mathias Eric Owona Nguini)

dimanche 5 janvier 2014

Théâtre : Pour la paix au Mali

La pièce « Guerre » de Lars Norén a été présentée le 19 décembre à l’Institut français de Bamako, sur une mise en scène d’Eva Doumbia et une interprétation des élèves du Conservatoire.    


La pièce s’ouvre sur une tranche de vie ordinaire d’une famille. La mère range le désordre laissé par sa plus jeune fille. Une autre fille, plus grande, est occupée à se maquiller. Quand arrive le père après deux ans d’absence sans nouvelle, tout s’écroule. Devenu un étranger, il s’attend pourtant à reprendre la vie de famille là où il l’a laissé en partant pour la guerre. Mais les choses ont bien changé en son absence. La guerre est finie mais ses séquelles, elles, sont bien restées.

Les cinq personnages de cette pièce, survivants de la guerre, portent tous des handicaps profonds : le père, vaincu et aveugle, traîne ses réflexes de survie; la mère, qui peine à faire assoir son autorité auprès de ses filles, a refait sa vie avec le frère de son mari ; lequel beau-frère a été obligé de battre son fils jusqu’à ce que mort s’en suive ; la grande sœur, encore adolescente, est prostituée et droguée ; la plus jeune sœur a un bras paralysé et, malgré ses 13 ans et sa virginité perdue, refuse de grandir et s’applique avec acharnement à être heureuse, pour ne pas perdre pied.  

La pièce met en scène les changements radicaux que la guerre apporte sur les hommes et les sentiments : les viols, l’horreur, les crimes, les gentils voisins qui se transforment en prédateurs, les trahisons, mais aussi, malgré tout, l’amour qui naît là où on l’attendait le moins. La seule échappatoire semble être la fuite vers d’autres cieux. Un projet qui se heurte au « Non » farouche de la petite fille. Tous doivent rester pour reconstruire la vie en lambeaux. Mais est-ce seulement possible ? La scénographie d’Eva Doumbia a installée partout sur la scène des lampes allumées, comme le fil tenu de la vie malgré les atrocités de la guerre.

La grande innovation de cette pièce a été de faire jouer plusieurs comédiens pour un seul rôle. Ainsi, trois comédiennes jouent le rôle de la mère, deux comédiens les rôles de la petite sœur, de la grande sœur et du père de famille. Cette variation les oblige à faire des efforts pour se dépasser mais, d’un autre côté, ressort de façon flagrante les disparités dans leurs jeux, les comédiens n’ayant pas la même présence sur scène, ni la même façon d’habiter leur rôle. Le risque étant de faire tomber l’attention du spectateur devant un comédien moins bon, comme cela a été le cas pour les rôles de la mère et du père.

Comme souvent chez Eva Doumbia, la musique de la pièce était jouée directement par un orchestre composé des élèves du Conservatoire de Bamako, présents sur la scène. Cette musique de scène en live a accompagné la pièce, donné du rythme aux dialogues et aux silences et porté les émotions des spectateurs.

« Guerre », écrite par le dramaturge suédois Lars Norén, résonne à Bamako au Mali avec justesse et authenticité, dans un contexte post conflit où l’heure est à la reconstruction du pays et la paix relativement fragile. Elle est le résultat de six ateliers de 15 jours que la metteuse en scène franco-ivoirienne a mené avec des élèves du Conservatoire de Bamako pendant deux ans, avec le soutien de l’Institut français du Mali. Aissata Boucary Maiga, une des comédiennes de la pièce, dit sa satisfaction : « J’ai amélioré mes connaissances du théâtre et mon talent, je suis super contente d’avoir travaillé sur cette pièce, cela m’a permis de beaucoup progresser». Eva Doumbia lance un appel aux directeurs de festivals pour que cette pièce puisse circuler. Mais avec 9 comédiens et 5 musiciens, cela sera-t-il évident pour les festivals africains aux moyens plus que limités ?

Stéphanie Dongmo, à Bamako